samedi 30 avril 2011

Snake skin

Voici le rêve que j’ai fait durant la nuit du 25 au 26 avril, ma première nuit au Nunavik. N’ayant plus de scanner à ma disposition, j’en fais seulement le récit avec une photo de mon carnet de croquis pour l'illustrer.

"Je suis dans une sorte de bibliothèque où a lieu une conférence sur le rêve. L’homme qui donne la conférence est jeune et a des cheveux bruns mi-longs. Il a quelques livres avec lui, mais globalement il est dans un grand dépouillement. Il ne lui reste plus grand-chose dans la vie, à part ses conférences.

Il dit que, dans nos rêves, lorsque nous nous rendons compte qu’un objet usuel ne sert plus à rien, ou que son usage devient absurde, alors nous basculons dans une autre dimension du rêve, une dimension plus chamanique et lucide.

Je demande au conférencier de me donner un exemple. De me dire, précisément, à quoi l’on voit qu’un objet devient inutile et provoque la "dissociation" voulue qui nous fait basculer dans autre chose. Mais il pense que je me moque de lui.

Vexé, il me donne un exemple grossier: il me demande d’imaginer un rouleau de papier toilette si grand que l’on ne pourrait pas s’essuyer avec. Cette remarque provoque un tollé dans la salle, mais le conférencier ne veut plus rien savoir et s’en va.
 
Soudain, un Inuit se lève et aidé de sa vieille mère se met torse nu. Comme pour illustrer les propos du conférencier il montre sa peau luisante du doigt en disant que c'est une peau de serpent, une peau qui le rend capable de muer."




jeudi 28 avril 2011

Nulle part

Après une heure de vol au-dessus d’une immensité blanche, où le ciel et le sol ne font plus qu’un, j’arrive au village de Kangirsuk, ce qui veut dire "la baie".

L’aéroport ressemble à une petite cabane en tôles et bois au milieu de nulle part.

Les repères me manquent. L’une de mes valises n’est pas arrivée et personne ne semble vraiment s’en inquiéter car les avions font quotidiennement le tour des communautés (quand ils peuvent décoller). Ma valise reviendra un jour, on me l’assure!
Des visages amicaux viennent à ma rencontre et je suis bien obligée de lâcher prise…

Les Inuits racontent que les aurores boréales roses emportent la tête des personnes qui les contemplent.

Il est clair que ce n’est pas le moment d’avoir la tête dans les nuages! 



mercredi 27 avril 2011

Kuujjuaq, la frontière

Première ville du Nunavik par sa taille et située en bas de la baie d’Ungava, Kuujjuaq fait penser à ces postes frontaliers de la conquête de l’Ouest, avec sa population grandissante, ses deux auberges et sa boîte de nuit où les aventuriers et les autochtones en viennent souvent aux mains tard dans la nuit sous l’effet de l’alcool.
 
La ville marque aussi une frontière géographique entre la forêt boréale et la toundra.

Son aéroport est un véritable carrefour qui distribue toutes les communautés du Nunavik et du Nunavut et où les voyageurs se retrouvent souvent coincés (comme moi) pendant plusieurs jours pour cause de mauvaises conditions météo.
 
 
On m’a raconté qu’au-delà de Kuujjuaq, les pilotes d’avion naviguaient à vue car les instruments de vol assistés électroniquement n'y fonctionnaient plus. Tout cela me semblait très abstrait jusqu’à ce que je remonte à bord du Bombardier d’Air Inuit et que je me rende enfin dans le pays des neiges éternelles... 

 



lundi 25 avril 2011

C’est Elle qui décide

Elle ne se laisse pas facilement approcher, car elle est dure, rude et dangereuse.

Elle ne se laisse pas impressionner pas nos injures et nos tentatives pour la dompter.

Ici, on vit à Ses ordres.

Elle a empêché l’avion bombardier d’Air Inuit de poursuivre sa route et me voici à passer une nuit à l’auberge de Kuujjuaq, la plus grande ville de la région.

Ici, on boit pour oublier qu’Elle peut être terrible.

Mais c’est aussi grâce à Elle que je me suis fait des compagnons de voyage, des bâtisseurs qui travaillent à agrandir l’école où je vais faire mes ateliers.
 
 


La parenthèse


Drôle de sentiment que celui qui nous fait prendre conscience d'être vraiment ailleurs. Étrange moment que celui où, dans une sorte de fulgurance, on se rend compte que l’on est effectivement entré dans la parenthèse du voyage. 
 
Moi, ça m’a saisi un soir dans la voiture d’un couple dont je venais de faire la connaissance quelques heures plus tôt. La petite dormait à l’arrière, la voix douce d’une chanteuse emplissait l’habitacle et la neige tombait sous la lune.
 
Pourquoi est-ce précisément à un moment pareil que le dépaysement arrive, plutôt que devant un paysage "tellement typique" ou dans le monument dont la visite "vaut le détour"?

dimanche 24 avril 2011

Chamane placébo

J’ai fait ce rêve durant ma première nuit au Québec, soit du 10 au 11 avril. Il illustre de manière métaphorique (c’est normal, c’est un rêve!) la place qu’occupe le chamanisme dans ma vie.

Quant au partage collectif de mes rêves (que ce blog rend possible
), c’est pour moi une manière de réhabiliter une pratique ancienne, présente chez les Inuits ainsi que chez d’autres peuples.


jeudi 21 avril 2011

Déjeuner sur la banquise

Ces quelques jours à Québec n'auront pas été de trop pour me préparer aux rudes conditions de vie dans le Nord. 
Pour les vêtements, j'avais déjà tout apporté de France. Mais il a fallu y ajouter un peu de nourriture de base: riz, lentilles, soupes, légumes déshydratés (etc.). Autrement dit: de quoi me faire mon repas en arrivant et agrémenter mon quotidien de quelques épices...

Reste la grande inconnue: les connexions internet à Kangirsuk et Aupaluk! J'espère pouvoir continuer à donner régulièrement de mes nouvelles!

mardi 19 avril 2011

La terre magnifique (Nunatsiaq)

Le territoire inuit s’étend sur 3 000 000 km2 entre la pointe de l’Alaska et le Labrador.

C’est ce que j’ai pu lire aujourd’hui au Musée des Beaux-Arts de Québec, où je suis allée voir la collection d’art inuit de Brousseau.

Mettez un artiste au milieu d’un désert de cailloux en hiver et il y fera pousser des fleurs!
 
La collection est composée d’animaux dansants, de femmes espiègles, de chasseurs intrépides et d’esprits sortis tout droit du Jardin des Délices de Hieronymus Bosch. Les noms des artistes n’ont d’ailleurs rien à envier au patronyme du peintre hollandais de la renaissance: Nick Sikkuark, Barnabus Arnasungaaq, Toonoo Sharky…

A Québec je continue de prendre des notes. Le chamanisme est omniprésent dans les sculptures, mais l'est-il encore dans les communautés du Nunavik aujourd'hui? Je crois bien que les pratiques anciennes ont toutes été supplantées par le Christianisme.

Durant ma première nuit à Montréal j'ai fait un drôle de rêve à propos de chamanisme... Je vous le raconterai bientôt!

samedi 16 avril 2011

Le harfang a les yeux de celui qui le regarde

Québec city: j’apprends en arrivant ici que le harfang des neiges, la mascotte de mon projet, est aussi l’emblème de la belle province. Le rapace niche ici, dans les remparts de la ville et un peu partout sur le site.

C’était involontaire, mais c’est une jolie coïncidence!

J'ai commencé une petite collection d'images.


Collage et dessins réalisés avant de partir...


Gravure inuite...


Et même la photo d'une prise électrique locale! Décidément, je me mets à en voir partout!

mercredi 13 avril 2011

Chassez le naturel

"Mon" premier ours blanc est un imposant spécimen empaillé dans la vitrine d’une boutique de souvenirs. Il me rappelle fort à propos que l’homme est un chasseur.

Il me tarde de quitter la ville.

Mais je dois encore être patiente. Prochaine étape: Québec ville et ses festivités littéraires et bédéistiques.

Dans quel rêve vais-je marcher aujourd’hui?


Hier, il a fait un temps splendide à Montréal.

Le gris des pierres se colorait d’un beige solaire, les façades monotones en briques prenaient du relief sous le jeu des ombres.

Aujourd'hui, il pleut à nouveau.

"La terre, cet animal, nous marchons dans son rêve" écrit Laure Morali*.

Les pierres des édifices urbains sont cette terre.
Le métal des voitures sont cette terre.
Le plastique issu des hydrocarbures sont cette terre que nous remodelons au gré de nos caprices.
 
Hier, on m'a parlé du Plan Nord, un grand projet de développement industriel du Nord du Québec.

La terre, cet animal... 

Dans le rêve de qui est-ce que je marche aujourd'hui?
 
  
* Laure Morali est écrivaine et vit à Montréal. Elle a publié récemment « Traversée de l’Amérique dans les yeux d’un papillon » chez Mémoire d’Encrier.

dimanche 10 avril 2011

Le bout du monde, c’est la porte à côté

J’ignorais tout du Nunavik il n‘y a pas si longtemps. Si je m’étais réjouie en 1999 en apprenant la création du Nunavut, ce territoire nord canadien administré par les Inuits, je ne savais pas qu’il existait également une province inuite au Québec.

Et quand j’ai formulé le projet de me rendre dans l’une de ces petites communautés disséminées sur les rivages glacés de la baie d’Hudson ou du détroit, je me projetais vers une destination quasi inaccessible.

Or, après un an de prises de contacts et de documentation sur cette région, l’impression de distance s’est réduite et le chemin vers « là-haut » semble soudain presque facile.

Après tout, il me « suffit » de traverser l’océan…

jeudi 7 avril 2011

atsoou (je ne sais pas)

On m'a dit: "il y aura un avant, et un après."

On m'a écrit: "la baie était toujours tout aussi limpide, mais depuis le 6 janvier le climat se révèle trop clément, trop doux et les bêtes s'affolent, notamment les ours polaires et les loups qui se baladent dans notre petit village..."

On m'a dit: "partir sera plus facile que revenir."

On m'a écrit: "ces dernières années, nous avons eu beaucoup de suicides parmi les jeunes du village et ce projet sera un bienfait pour eux."

On m'a demandé: "apportez-vous votre manger? Les produits secs sont très dispendieux ici !"

On m'a dit: "imagine tout ce que tu veux, lis tout ce que tu veux sur les Inuits: la réalité sera tout autre!"

mercredi 6 avril 2011

La baie

Avant de partir en voyage, je fais souvent des rêves en rapport avec le lieu où je me rends. Celui qui suit date de la nuit du 4 au 5 mars 2011...